Nous passons de l’âge de la pierre, souvenir minéral classique avec le monument
funéraire, à la guerre du feu avec, consécutivement aux progrès récents
de la crémation, une concurrence annoncée entre les crématoriums et des escarmouches
déjà sensibles entre les fabricants/installateurs de fours.
Au niveau des professionnels funéraires, on passe aussi de l’âge de pierre, celui
de la primauté de la matière (fournitures vendues) à l’âge du fer (du faire) avec
la place de plus en plus importante des services fournis aux particuliers. On
constate ainsi une moindre importance de la fourniture de produits profitant à
celle des exécutions de services.
Alors que cette mutation ne peut que s’amplifier, trop de professionnels continuent
à se référer à des modes de réflexion qui prévalaient hier quand la fourniture
du cercueil ou du monument constituait l’essentiel de la facture.
On trouve ainsi de nombreux chefs d’entreprise considérant comme acquis leur
volume de clientèle locale et repoussant toujours plus loin la nécessité d’anticiper
les changements. Or la clientèle ne se transmet plus comme on reprenait
jadis des barres de portage de cercueil…
Et le besoin d’anticiper déborde le champ de la seule entreprise.
Confrontée à une crise sans précédent et aux effets de la mondialisation, notre
société devra malgré tout assurer une dignité funéraire pour tous et pour chacun
d’entre nous.
L’échelon pertinent des solutions, en matière de solidarité, étant la commune
ou le département, on pourrait facilement penser que c’est au niveau des services
publics qu’une réponse s’élaborera face aux nouvelles nécessités. En
quelque sorte nous risquons d’assister à une explosion du nombre de convois
d’«indigents», comme il y a un siècle.
Or la déconvenue de nos élus en décembre face au constat d’une baisse de 40 %
des recettes consécutivement à la fin de la taxe professionnelle est un mauvais
signe quand on attend un engagement de leur part dans la question du financement
futur des funérailles.
Ce sont les réseaux funéraires privés qui seront probablement exposés en première
ligne avec la nécessité ici de trouver des solutions originales.
Dès lors, soit la définition d’une dignité funéraire sera revue à la baisse en
termes de moyens engagés sur chaque convoi, soit la rentabilité escomptée
par les investisseurs dans le funéraire se brisera sur le rocher des réalités futures
de la crise.
Les financiers vont-ils se brûler les doigts à force de frotter les pierres à silex
dans le funéraire ? On peut le penser.
Aujourd’hui, seul Thanatos, Dieu de la mort, connaît de quel bois se chaufferont
les crématoriums dans les prochaines décennies…