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La marseillaise des PF

Cela fait un bout de temps que mon patron me dit que je suis un fada.

Sur le mode de l’aveu, je pense qu’il a probablement raison.

Brisant le sceau de la confidence, je vais vous avouer une authentique démarche effectuée dans les années 80. Passionné de cérémonial, dans un élan de mégalomanie, j’ai proposé sous forme de poème en alexandrins mes services à François Mitterrand.

Je le savais sensible à la poésie… Hélas, je le regrette aujourd’hui, mon interlocuteur était gravement malade et je l’ignorais. Je ne voulais pas lui faire du mal mais seulement l’incinérer. Il paraît qu’il l’a mal pris…

En fait j’étudiais les rites et leur support mythologique. Le constat devant la montée des pratiques crématistes était alarmant : il nous manquait une mythologie sur laquelle on aurait pu fonder un cérémonial crématiste. Alors j’avais imaginé un scénario fou : une Via Dolorosa partant de la Bastille et aboutissant à la station de métro Richard Lenoir, devant le siège OGF/PFG. Mitterrand crucifié par les légionnaires de la Romaine des Eaux, le maire de Lutèce se lavant les mains du sang de ce juste. Ensuite une petite crémation vite fait bien fait au Père Lachaise et la résurrection découverte par une Marie Madeleine gauloise (perspective qui aurait pu plaire au héros déguisé en jardinier de Latché).

In fine, le miracle aurait été confirmé par deux compagnons marchant vers un magasin Emmaüs avec une rose à la main, suivi d’une apparition parmi les disciples retranchés rue Solférino. Mais non, tout ce petit monde n’a pas joué le jeu. Et nous n’avons toujours pas de «mythe errant» pour soutenir la qualité des rites crématistes.

C’est dommage car les malheurs actuels de la filière le prouvent, un mythe aurait pu nous protéger du retour de flammes sur le marché. En effet, une famille marseillaise est entrée dans un bureau de pompes funèbres et lorsque l’employé lui a demandé ce qu’elle voulait, celle-ci lui a répondu «On veut un enterrement peuchère…».

L’employé, trois fois hélas, était affilié à la Grande Loge Unie d’Angleterre, ce qui explique qu’il ait traduit l’expression populaire locale «peuchère» par le mot low cost. Voilà une funeste erreur qui a remonté aussitôt le couloir rhodanien et s’est répandue «comme la vérole sur le bas clergé». L’expression s’impose puisqu’il s’agit d’une religion, celle du moindre prix, avec un clergé commercial qui tourne le dos au bon sens fondant les rites funéraires. Résultat : les portes du marché se sont ouvertes au Grand Orient avec des importations venant d’Inde et de Chine (vous l’aviez ainsi compris).

Voici donc le contexte dans lequel on assiste à des initiatives les plus diverses.

2013 a vu en effet Philippe Lerouge(t), qui n’est pas de Lille, entonner un air bien connu :

«Allons enfants de l’ex-patrie, le jour de gloire est arrivé…». Or les nouveaux actionnaires, qui ne sont pas des sans-culottes, attendent plutôt de lui le refrain : «Ah çà ira, çà ira, çà ira», sans s’occuper de la suite du couplet : «les régies publiques à la lanterne…».

Au même moment, la chouannerie du Grand Ouest mobilise une réaction des croquants du funéraire, indépendants et fidèles à l’orthodoxie du métier. A la Roche sur Yon, par exemple, des contacts existent avec Rome et l’Angleterre.

Plus au Nord, à St Malo et environs, on s’est inspiré de Robert Charles Surcouf et du tonton Christobal chanté par Pierre Perret. Mais nul ne sait comment s’en sortiront demain tous ces protagonistes sur le champ de bataille.

Alors à quel sein se vouer dans des temps aussi troubles ? A celui de Marianne la républicaine ? Mais aujourd’hui, le monopole en service public communal et la monnaie nationale ont fondu dans le même creuset d’une forge internationale et libérale.

Il faut donc changer de funeste contine. Par exemple, mieux vaut chanter ensemble :

«il est né le divin funé, jouez hautbois résonnez musettes…» plutôt qu’«un sang impur abreuve nos sillons». Car le nouveau funéraire arrive, en pleine ébullition (dossier dans notre prochain numéro).

En 2015 et 2016, il faudra reconnaître et suivre sa bonne étoile car de nouveaux rois mages vont apparaître pour faire autre chose que contempler le petit Jésus dans la crèche.

In fine, à l’instar de François Villon, il faudra alors peut être prier Dieu «que tous nous veuille absoudre»…

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