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Ordo ab chao

L’ordre émerge du désordre.

Cette devise latine correspond bien à la période qui s’ouvre désormais à vous.

En tout premier lieu, la crémation n’est plus une révolution à mener au stade où bientôt fonctionneront à plein régime 200 crématoriums sur le territoire métropolitain. Et quand on avance 4 000 euros comme niveau de dépense funéraire pour une crémation, on voit bien que cette solution n’est plus un recours pour payer moins cher.

L’autre poncif très laminé est la référence à la notion de mission de service public alors que la tête institutionnelle, le CNOF, ne s’est réuni qu’une seule fois en deux ans et ne pèse en rien ou si peu sur la marche du métier.

Passons maintenant à ce qui bouge. Sérénium, basé à Laval et qui effectue 8 000 convois par an avec 150 salariés et 50 millions de CA, a réussi à mobiliser des investisseurs en septembre dernier. BPI passe de 2 à 10 millions en cash disponible et le fond Raise, créé en 2013 à Paris, investit 20 millions. Sérénium dispose donc désormais d’une «tirelire» augmentée de 28 millions tandis que MM.Ortiz et Florac, fondateurs du groupe, restent majoritaires dans le capital. Situé dans l’Ouest de la France, Jean-Charles Florac nous précise que Sérénium élargira probablement son rayon d’action tout en maintenant son mode de fonctionnement basé sur la maîtrise de tous les paramètres de gestion.

Ce qui est selon nous un enseignement, c’est de voir le fond Raise débuter ses activités d’investisseur par le secteur funéraire. C’est le signe que la branche n’est plus une niche à la marge mais apparaît aujourd’hui en qualité de secteur d’investissement rassurant (pour une fois la mort ne fait pas peur…). A cette évolution (soutenue par les prévisions de mortalité croissante) correspond aussi le vieillissement des dirigeants de PME de pompes funèbres et l’alourdissement de la valeur des entreprises depuis 20 ans, ce qui peut les placer hors des capacités financières de reprise par les enfants. La mobilisation des capitaux en amont et la taille acquise par certains opérateurs débouchent inévitablement sur un retour de concentration du marché entre les mains de seulement quelques acteurs. Cette situation s’annonce à l’orée des cinq ans à venir. Ce qui va changer beaucoup de choses :

- sur le plan syndical, la FFPF, qui s’appuie sur un tissu de petites entreprises, se verra contrainte d’organiser un «concile Vatican II» et à la clé son éventuel aggiornamento ;

- en matière de représentation des salariés de la branche, le système des délégués syndicaux actuels qui sont encore tous des salariés d’OGF devra être revu pour être réellement représentatif et indépendant ;

- sur le plan des enseignes nationales, cette évolution va marquer le renforcement du bouquet de compétences à réunir impérativement au niveau de la direction générale ;

- sur le plan du prix des funérailles, malgré les stratégies à hauteur stratosphérique, les moyennes ont déjà cédé 15 % en quelques années et la chute devrait continuer ;

- en matière de marketing, le marché est définitivement devenu mixte, mi proximité, mi Internet et le référencement compte autant qu’un point de vente classique ;

In fine deux scénarios sont alors envisageables :

- Soit les institutionnels (syndicats, consommateurs, administration, justice) se mobilisent pour bloquer les stratégies contestables de captation du marché par l’amont financier (les outils et moyens juridiques existent) et dans ce cas on peut espérer voir à l’avenir des agences privées travailler en tandem intelligent avec les «gros» locaux, le tout dans un contexte de prix maîtrisés et à l’intérieur d’un cadre déontologique bien défini ;

- Soit l’anarchie du profit à tout prix et à tous les étages s’impose, avec ses tristes hypocrisies et alors, en réaction, nous assisterons à la montée en puissance d’intervenants radicalement marqués (pompes funèbres cultuelles et/ou associatives) qui obtiendront finalement l’explosion du système. Ce sera alors un 1993 bis aspergé d’eau de Lourdes, de Zem-zem ou du Jourdain et/ou maquillé en lutte finale des ouvriers et paysans.

Autrement dit, dans le dernier cas, ce sera chao ab ordo…

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N°322
03/2024
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