

Désordre public
Nos nécropoles sont devenues le théâtre des pires absurdités que l’on pourrait recenser comme on égrène un chapelet :
- beaucoup de communes pratiquent la reprise des concessions sans procéder à l’exhumation des «occupants» et recèdent la jouissance du terrain en l’état
- depuis la loi du 19 décembre 2008, on attend toujours que la réglementation précise le pouvoir de police du maire sur les tailles de monuments (où commence l’ingérence restant interdite sur l’esthétique ? Voir notre dossier page 36).
- les terres de concessions : certains maires décrètent que ce sont les particuliers et leurs artisans qui doivent régler à leur échelle individuelle un problème qui n’est gérable qu’à l’échelle collective (voir dossier sur FM 229, la politique de l’autruche).
- la clé du portail du cimetière : depuis vingt ans, certaines communes jouent à cache- cache avec les marbriers à la suite d’une paranoïa administrative (impossibilité de travailler avec un portail fermé à clé, horaires d’ouverture décalés des impératifs de service aux familles et aux usagers du cimetière, notamment à l’égard des plages horaires de convois, en partie à cause des 35 heures, RTT et absentéisme chronique). N’oublions pas les nouvelles contraintes pour effectuer les exhumations en dehors des horaires d’ouverture au public (nouvel article R 2213-46 du CGCT, loi du 19 décembre 2008), mesure dont le pays aurait bien pu se passer…
- les implantations de cimetières sont souvent fantaisistes au regard des impératifs de préservation des nappes phréatiques. Plutôt que de les déplacer ou d’effectuer des travaux de drainage, les maires prennent des arrêtés coercitifs obligeant les usagers à se doter de caveaux dits «autonomes», lesquels, en sus du coût d’équipement, peuvent devenir soit des baignoires à cercueils (rétention de l’eau intérieure), soit des flotteurs soutenus par la poussée d’Archimède quand il y a montée de la nappe phréatique.
- le jardin du souvenir doit comporter la mémorisation des défunts dispersés mais les conditions de celle-ci, coûteuses et à vocation éternelle (quelle prétention !), ne sont pas encore matériellement définies et personne ne sait qui doit payer (commune ou usager ?).
- les ossements exhumés par décision communale doivent désormais être triés selon des critères confessionnels estimables à l’emporte pièce et sont traités de manière inégalitaire, selon une philosophie du deux poids deux mesures (loi du 19 décembre 2008)
- le communautarisme a vaincu le triple idéal de liberté, égalité et fraternité avec plusieurs incitations ministérielles favorables à la création sournoise de carrés confessionnels alors que ces derniers, à l’instar d’un passé que l’on ne voudrait plus revoir, dénient aux défunts un voisinage pacifié, serein et républicain. Les Belges vont encore plus loin depuis cet été en autorisant l’inhumation sans cercueil, en simple linceul, en toute abstraction d’hygiène au regard des émanations du corps durant le premier mois d’inhumation.
Et que dire du zèle déplacé quand certains veulent imposer aux gravures sur monument un régime de surveillance calqué sur celui des exhumations? Que dire aussi des exhumations de corps contagieux au bout seulement d’un an en terre alors qu’aucune étude scientifique ne prouve l’absence de danger sur une durée inférieure à 5 ans ? Et les 5 ans pour reprendre la sépulture en terrain général alors qu’il faut parfois 20 ans ou plus pour réduire le corps ? Et le statut d’agrément des cercueils indifféremment pour inhumation ou crémation alors qu’on sait que les impératifs varient d’une situation à l’autre ? Et pour couronner l’ensemble, voilà que le diable et tout son train s’acharne désormais et de plus en plus à piller ou détruire les tombes (faits divers ces derniers mois).
En vérité, le cimetière d’aujourd’hui est une loufoquerie dans laquelle l’architecte des bâtiments de France arrive in fine comme une cerise sur le gâteau avec des exigences irréalistes, discrétionnaires et démesurées (loi de 1913).
Au vu de tout cela, et ce n’est pas la peine d’insister à coups de concepts sur l’art funéraire, ne comptez plus sur nous pour mourir !
Le charme est rompu et notre décision est irrévocable, dans un souci d’éternité paisible…
Fiche technique